mardi 27 juin 2006

NOUVELLE LISTE D'ÉTÉ

En janvier j'avais établi cette liste.
Liste d'Eté

L'été a commencé, à en croire le calendrier et le thermomètre. Les journées s'étirent, la ville s'écrase de chaleur, les corps se plombent, le désir de sieste s'enracine, les maisons s'ombragent, les volets se referment sur de vagues secrets. Je n'aime pas vraiment l'été et ses torpeurs. J'aime les vacances, mais les miennes ne sont pas encore là.
Je suis, aujourd'hui, d'humeur chagrine, et portée aux bilans plus amers que doux.
Certains des voeux que je formulais cet hiver sont d'ores et déjà renvoyés au néant des possibles enfuis, des non-incarnés, des remis-à-un-futur-indéterminé.
Il en est ainsi par exemple de :
21. Ne pas avoir à conduire.
23. Déménager.
24. Faire une grande fête pour ma crémaillère.
25. Me préparer à un nouveau poste.
34. Assister à une fête du feu au solstice
35. ... plutôt que d'y corriger des copies
37. Voir, le 14 juillet, des feux d'artifice qui ressembleraient vraiment à ceux de Gandalf



D'autres semblent très compromis. Quelques-uns, trop rares, sont en bonne voie. Je lance un appel à ceux d'entre vous qui pourraient me procurer :
Une escapade dans le Grand Nord.
(2. Voir une aurore boréale.)
Des cours de langue conviviaux et stimulants...
(7. Apprendre une langue étrangère.)
Ou des leçons d'astronomie (avec travaux pratiques)
(13. Prendre des cours d'astronomie.)
Un indice sur la façon de...
(16. Découvrir un aliment inconnu.)
ou de...
(18. Mesurer une marée.)
Sans parler, bien sûr, de celui-là :
(26. Entrouvrir les voiles entre les mondes.)

Mais heureusement (vous remarquez? je ne puis m'empêcher de terminer sur une note optimiste...), il y avait ceci :
42. ... Trouver 59 autres idées de choses à faire cet été
Ajoutons, donc, sans craindre de tricher.

43. Rédiger un manuel de Défense contre les Forces du Mal
44. ... et bien sûr enseigner cette matière à de jeunes sorciers !
45. Porter le deuil d'un super-héros et organiser ses funérailles.
46. Acheter un corset (ou deux...).
47. Porter de merveilleux costumes.
48. Travailler avec enthousiasme et diligence aux &@#* articles que je dois, et les réussir mieux que les derniers en date.
49. Avoir des nouvelles de ceux qui me manquent ou me manqueront.
50. Trouver un Réceptacle-de-Glamour et l'offrir à celui qui se reconnaîtra.
51. Trouver la clef des cours secrètes de Venise.
52. Tant que j'y suis, faire aussi l'amour avec...
53. ... et/ou avec...
Heureusement, on peut toujours allonger les listes.

jeudi 22 juin 2006

DECLARATION COMPROMETTANTE

Vous allez me manquer terriblement, savez-vous? Plus que je ne saurai le dire.
Et je ne peux m'empêcher de penser qu'aucun autre, jamais, ne m'a autant manqué. Je sais bien que ce n'est pas vrai, qu'il y en aura d'autres après vous, que je ne puis voir encore et qui me toucheront autant... Je le sais et cela ne change rien.
Vous allez tellement me manquer.
Je sais bien que c'est mieux, qu'il doit en être ainsi, qu'il est temps que vous retrouviez votre liberté, que c'est la seule solution. Je le sais et cela ne change rien.

Je ne sais pas ce qui me manquera le plus. Cette question est bien vaine, mais c'est avec une joie mélancolique, une poignante fierté, que je dresse cette liste.
Je regretterai votre enthousiasme, votre ouverture d'esprit, vos tendances sporadiques à l'anarchisme. Je regretterai votre vivacité et vos bouderies. Je regretterai vos imperfections, vos erreurs, je regretterai même ce qui m'agaçait parfois. Je regretterai votre humour, nos fous rires, et votre aptitude rare à l'auto-dérision. Je regretterai les surprises que vous m'avez causées, souvent bonnes. Je regretterai vos côtés enfantins, votre amour pour Peter Pan, votre ressemblance avec lui. Je regretterai aussi vos côtés matures, bien sûr, la fierté que vous éprouvez à passer pour quelqu'un de plus âgé, vos effets de coiffure, votre béret blanc.
Et puis votre curiosité et votre intelligence, évidemment. C'est votre intelligence que j'ai aimée d'abord.

Seulement cela n'aurait jamais suffi. Si vous aviez été moins paresseux, si vous n'aviez pas essayé de vous défiler quelquefois, si vous n'aviez pas fait des choix si partiaux… tout aurait été moins intéressant. Si vous aviez eu moins d'esprit de provocation, moins de don pour la persuasion, moins de promptitude à adopter cette vision de l'argumentation-combat, tous les coups sont permis, tant qu'ils sont au-dessus de la ceinture.

Votre égocentrisme. Votre façon de chanter "La Bohème" à tue-tête, d'une voix sonore, ou d'improviser un madison dans la cour. Votre côté fleur bleue. Votre rigueur morale et votre amoralisme. Votre culture. Vos défis et votre façon de les relever, de vous pavaner avec une serviette pour tout vêtement, un matin d'été. Vos private jokes récurrents. Votre appétit dévorant -- de toute nourriture. Et le plus trépidant des matches de foot.
De tout cela je suis heureuse. Tout cela je le regretterai.
Mais je souris. Je suis très fière de vous. Très confiante en votre avenir.
Je ne vous verrai plus, mais vous irez loin, très loin en avant, et je penserai toujours à vous avec un sourire aux lèvres. Je vous veillerai de loin. Je ne vous dis pas d'emporter ma bénédiction en partant: vous n'en avez pas besoin. Votre indépendance est une grande part de votre charme.
Vous continuerez de courir sur un terrain de foot, de vous prendre trop au sérieux, ou pas assez, de donner dans le narcissisme délicieux ou l'adorable humilité, et d'avoir ce petit sourire ironique voltigeant au coin de votre bouche.
C'est bien. J'aime qu'il en soit ainsi.
Je serai un bon petit soldat, je sourirai, et ne pleurerai pas.
Mais qu'ils aillent au diable, les bien-pensants, les rigoureux gardiens des rôles établis, des cases dont il ne faut surtout pas sortir. Bien sûr que je vous aime. Je ne vois pas comment on pourrait ne pas vous aimer.
Je vous aime. Tous, et chacun.

mercredi 21 juin 2006

UN SIXIÈME SENS, ET UN SEPTIÈME

Je me surprends à sourire. Ma démarche est plus légère, mes pensées coulent plus aisément, mes actions s'enchaînent plus naturellement. Une plus grande fluidité, une plus grande aisance, c'est bien cela. Chercher des réponses à mes questions, murmurer à mes amis lointains des mots de réconfort, ouvrir une fenêtre dans mon esprit pour entendre et pour voir, une fenêtre sur Lyon, sur Paris, sur Liverpool, sur Rouen. Tout cela est dans le cours normal des choses.
Pendant des semaines, j'ai été muselée, enchaînée au sol, arrimée à un espace et un temps unique, chassée des frontières où je m'ébattais à mon aise. Ce n'était même pas douloureux. Mais frustrant, réducteur. C'est à présent seulement que je m'en aperçois, à présent que cette dimension m'est rendue et que je suis joyeuse comme d'un verrou qui saute. Oui, c'est maintenant que je le sens, que mes yeux s'ouvrent vraiment, que je réalise: pendant ces semaines, je voyais le monde en noir et blanc. Ou plutôt en trois dimensions, coupée des autres.
Ou, plus justement encore, à travers cinq sens seulement.
Je retrouve le Réseau et le Haut Débit de son Flux, et je comprends qu'il est devenu mon sixième sens.

Ou mon septième, car quelques jours plus tôt j'avais retrouvé un autre de mes sens. Pas vraiment perdu, juste un sens dont je m'étais éloignée, trop longtemps, et qui est revenu caresser ma peau et filtrer mon regard, étoilant le monde. Ce sens-là est aussi un royaume, aussi un homme. Je ne l'avais pas oublié, je n'ai jamais pu l'oublier, mais je ne savais plus à quel point il était... présent. Omniprésent. Je l'ai relu, effeuillé, écrit. J'ai senti à nouveau le souffle de sa main, la pression de sa voix. Ses mots et ses merveilles ont recommencé d'enchanter le monde, de l'infléchir. Une dimension, un sens, un homme "cute as hell" and "a scary son of a bitch" -- mais jamais avec moi. Mort, peut-être, et ne vivant plus que sous la forme d'un de ses anciens sujets. Néanmoins omniprésent. Miraculeux. Infini. Et, de tous, le plus fidèle, comme je l'écrivais ici il y a près d'un an.
Et Dream est mon septième sens.