mercredi 22 février 2012

Plus Beau Poème d'Amour ?

Je me demandais il y a peu, à cause de la célébration poétique de la Saint-Valentin par le Guardian, ce que je pourrais bien répondre si on me demandait quel est, pour moi, le plus beau poème d'amour en langue française.

Très étrangement, je n'ai pas pensé à Ronsard, ni à Louise Labé, ni aux Romantiques, ni aux poètes du XXème siècle que j'aime tant (Jaccottet le premier).

J'ai pensé à Verlaine, dont la poésie ne me touche pas toujours, et à ce texte de Parallèlement que je n'ai jamais oublié, "Laeti et errabundi", et dont je ne cite ici que la fin.
Fin bouleversante, que je n'en finis pas d'aimer, écrite alors que la rumeur (alors fausse) de la mort de Rimbaud, venait de l'atteindre, des années après leur rupture.

On vous dit mort, vous. Que le Diable
Emporte avec qui la colporte
La nouvelle irrémédiable
Qui vient ainsi battre ma porte !

Je n'y veux rien croire. Mort, vous,
Toi, dieu parmi les demi-dieux !
Ce qui le disent sont des fous.
Mort, mon grand péché radieux,

Tout ce passé brûlant encore
Dans mes veines et ma cervelle
Et qui rayonne et qui fulgore
Sur ma ferveur toujours nouvelle !

Mort tout ce triomphe inouï
Retentissant sans frein ni fin
Sur l'air jamais évanoui
Que bat mon coeur qui fut divin !

Quoi, le miraculeux poème
Et la toute-philosophie,
Et ma patrie et ma bohème
Morts ? Allons donc ! tu vis ma vie !
 Et pour vous ? Quel est le plus beau poème d'amour en langue française ?

mardi 21 février 2012

Morningstar

Je ne sais pas trop pourquoi, ces temps-ci, il revient rôder près de moi.
Je sais pourtant bien, je l'écrivais sur ce blog il y a des années, que "cette relation-là est bien moins tendre, bien plus complexe [que toutes les autres, sauf une], et il vaut mieux qu'elle n'aille jamais trop loin..."
J'ai pourtant continué d'écrire sur lui, et de croiser sa route. Pas trop souvent. Heureusement.

Et voici que me revient ce texte, lu et traduit autrefois, dans un autre monde (plusieurs) et d'autres rêves, et j'en suis encore bouleversée.

THE LAMENT FOR LUCIFER

Close my eyes to the sunliqht,
My Morning Star, my storm.
Fold your wings in grace and take your leave of me.
Taste my blessings; as you go.
We will not lie as one again
For my womb is a garden of rot.
My heart is ashes.
My tears are blood.
Hunt well, my breath, and take with you
The bones of our children, wrapped in palm leaves.
Scatter them to the horizon and allay their cries.
I shall tend a grave of deep water
And shall wash away our enemies.
Bide well, my desert wind,
Hold aloft your blade and oil it with tears.
I shall be the owl upon the night wind,
The cat with silent paws
And the serpent at the heels of Caine.
I shall be the seed of tears, but my eyes shall be sand and silence,
My heart shall be the desert and the sea,
And my cry shall be the owl gone hunting
As the sun departs my sky.
Weep not, my beloved,
But hold me close in your distant chase.
We shalt be the thorns of ruined Eden
Forget me not
Sun to my moon
Cry to my silence.
Que fais-tu là exactement, Lux ?

jeudi 16 février 2012

The Touch of Dream

Le jour de la Saint-Valentin, j'ai découvert de très geek célébrations de cette fête mal-aimée, et sans doute à raison.
En particulier cette carte, qui figurait dans la délicieuse liste du toujours formidable site The Mary Sue :
Et cette vidéo, dont ceux qui me connaissent savent quelle image m'a touchée le plus :

Happy Valentine's Day from LOVEFiLM on Vimeo.


Mais je suis une prof de lettres autant qu'une geek, et j'ai aussi découvert les multiples poèmes d'amour en anglais proposés par le Guardian à cette occasion.

Ma découverte favorite a sans doute été "Touch" de Thom Gunn que vous pouvez écouter, lu par Blake Morrison, sur le site du Guardian.

Ou lire vous-même :

Touch by Thom Gunn

You are already
asleep. I lower
myself in next to
you, my skin slightly
numb with the restraint
of habits, the patina of
self, the black frost
of outsideness, so that even
unclothed, it is
a resilient chilly
hardness, a superficially
malleable, dead
rubbery texture.

You are a mound
of bedclothes, where the cat
in sleep braces
its paws against your
calf through the blankets,
and kneads each paw in turn.

Meanwhile and slowly
I feel a is it
my own warmth surfacing or
the ferment of your whole
body that in darkness beneath
the cover is stealing
bit by bit to break
down that chill.

You turn and
hold me tightly, do
you know who
I am or am I
your mother or
the nearest human being to
hold on to in a
dreamed pogrom.

What I, now loosened,
sink into is an old
big place, it is
there already, for
you are already
there, and the cat
got there before you,
it is hard to locate.
What is more, the place is
not found but seeps
from our touch in
continuous creation, dark
enclosing cocoon round
ourselves alone, dark
wide realm where we
walk with everyone.

Et vous saurez alors pourquoi je l'ai tant aimé. Pour la justesse et la précision des sensations qu'il décrit, dans cet instant intime et rarement conté du coucher auprès de l'aimé endormi. Mais aussi pour ses références au royaume du rêve, au Dreaming, que tous ses habitués reconnaîtront,comme moi, dans la dernière strophe.
And the touch of Dream himself is so precious to me.

Puissiez-vous avoir vécu une belle journée, auprès de vos aimés, ou de Dream qui est sans doute en ce jour le Valentin de tous ceux qui n'en ont pas.