dimanche 5 mars 2006

LES BRANCHES DE LA NUIT

C'était un soir, après le coucher du soleil.
Et j'étais seule dans l'appartement, arpentant cet espace sans le peupler. J'ai toujours su, comme chacun de nous, que mes pas résonnaient différemment dans la nuit, que les pièces familières s'élargissaient, s'approfondissaient.
Et je lisais, annotais, un livre sombre, soulevant des pans de l'humaine schizophrénie.
Et j'ai vu un épisode d'une série aimée, qui mettait justement en scène cette familière et permanente schizophrénie, nos rêves qui en quelques minutes retracent toute une vie, avec sa richesse et sa complexité, auprès de l'être aimé. La façon dont notre esprit isole et suit et amoureusement caresse un fil des possibles, pour lire un avenir, pour vivre une fois, avec une éblouissante netteté, une existence que nous ne vivrons pas.
Et dans cette même nuit un ami très cher m'appelait, me chuchotait des mots de douleur inquiète, de piège qui se refermait sur ses erreurs, et parlait de retour en arrière, de prix à payer. Ma force ne suffisait pas à l'apaiser. Rien n'aurait suffi.
Alors je marchais dans le silence, avec la nuit qui amplifiait mes pas, mon esprit qui se tordait autour de ces idées, mon coeur autour de ses sentiments -- et c'était là.
Les branches de la nuit. Les monstres qui s'y accrochent. Les ténèbres qui rampent aux frontières de notre monde de Lumières.
Oh, oui, c'était là.
Bien plus terrifiant que les créatures des romans d'horreur, des films d'épouvante. Bien plus insidieux que tout combat contre le Mal, en un monde plus large. Bien plus sombre que les magies de nos bibliothèques.
Et plus réel.
Pendant un instant c'était là, je les regardais en face, les monstres d'ombre qui font trembler l'assise de ce monde.
Et puis on a sonné à la porte, j'ai rallumé la lumière, j'ai parlé. J'ai fini ce livre, j'en ai lu d'autres, l'ami a fait taire ses angoisses -- les monstres sont repassés au-dehors, à l'abri de mon regard.

Ils sont là pourtant, je ne dois pas l'oublier, ils pourraient nous tomber dessus d'une nuit à l'autre. En fait, je ne doute pas qu'ils le feront.
Ceux qui s'accrochent aux branches de la nuit, et regardent le monde des hommes de leurs dents luisantes.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Monster...

Naoki Urasama

Anonyme a dit…

Monster en effet...

Alba je suis déçu de voir que tu mates la série au lieu de lire le manga (admirablement bien traduit en français d'ailleurs)...

Quand je pense que je vais jusqu'à la folie suprême de lire 20th Century Boys (Nijû Sêki Shônen) dès qu'il est disponible en japonais juste pour en savoir le plus possible le plus tôt possible,...

(Hahaha d'ailleurs il est malin Urasawa xD "Tu es qui? _Mais tu le sais qui je suis... _Ah bon? _Je suis... un Twentieth Century Boy!" hahaha elle me fera rire longtemps cette blague-là!)

Arnaud qui adore quand les scénaristes sont si doués qu'ils se permettent de nous prendre pour des co...uillons...

Alba a dit…

En fait, non, my favourite padawan.
La série en question était, plus banalement, "Les 4400". J'aime beaucoup

Anonyme a dit…

Je sais, je sais. Je ne mentionnais le manga (papier) que pour t'inciter à le lire, car il est génial, et complètement dans le thème de ton message ! :)

Anonyme a dit…

"My favourite"? Y en a d'autres que moi? :'(

Bref, je t'invite à lire mon (nouveau) blog... Le dernier article mentionne un probléme que nous avions évoqué précédemment et sur lequel j'attends ton avis avec impatience =)

La flemme de mailer donc je commente :p

(L'adresse est là, clique sur le pseudo)

Bises =)

Alba a dit…

S'il n'y en avait pas d'autres, quel mérite aurais-tu à être le favori ?
Je m'en vais de ce clic te lire.

Alba a dit…

http://www.yozone.fr/article.php3?id_article=727

Vous m'avez convaincue.
Un jour, dans un avenir utopique où j'aurai le temps de passer une semaine à lire... je lirai ça.

Anonyme a dit…

Etant donné que je me lis l'intégrale de Sandman grace à toi, c'était la moindre des choses que je t'ouvre à la lecture du san Urasawa :)