J'ai allaité mon fils pendant huit mois. C'était l'an dernier seulement, et c'est une expérience qui laisse des traces. J'en ai parlé en détail sur Geekmom (en anglais).
Une fois n'est pas coutume, je vais laisser les mots s'effacer derrière les images. Parce qu'il s'agit bien d'image, ici. Pas de savoir si l'allaitement asservit les femmes ou s'il est le devoir sacré de toute mère, pas même de savoir ce qu'il nous apprend sur notre espèce et sur nous-mêmes.
Il s'agit de savoir si l'on peut montrer une mère allaitante.
Si l'on peut la regarder.
Si c'est indécent.
Si c'est provocateur.
Il s'agit de savoir ce que ces récents débats disent de nos sociétés et du regard qu'elles portent sur le corps féminins.
Il s'agit d'images.
En voici deux.
La couverture du premier épisode d'un comic book américain qui a suscité la violente réaction d'un autre illustrateur et un débat qui s'est répandu comme le Web le permet désormais, de tweets en blogs et retour, à l'infini.
Vous pouvez lire par exemple la réaction initiale de l'auteur offensé, et la réponse de l'illustratrice mise en cause, Fiona Staples, sur Comics Alliance.
Pour ma part, je ne saurais dire combien je suis heureuse de voir enfin une super-héroïne allaiter, moi qui déplorais que les littératures de l'imaginaire fassent si peu usage des possibilités offertes par le lait maternel et ses mystères. J'ai même le vague projet d'une histoire de fantasy dont l'héroïne serait une nourrice.
Par hasard, les hasards du calendrier des expositions d'art, je suis tombée quelques jours plus tard sur ce tableau attribué à Léonard de Vinci ou l'un de ses élèves, La Madonna Litta.
Je n'en suis pas venue à comparer l'iconographie de notre temps à celle de la Renaissance. Je me suis simplement émue du visage de Marie, tendre, émerveillé, concentré sur l'enfant et comme illuminé par lui — et qu'on peut lire de manière profane, tant cette lumière de l'acte, de l'intimité du lien, ne dépend pas de la nature divine de l'enfant.
Et je me suis amusée, aussi, de constater que Marie porte sur ce tableau une robe d'allaitement, fort réaliste, avec des fentes verticales fermées de points lâches qui s'écartent pour permettre l'accès au sein. Moderne ?
Pour le reste, je vous laisse juges.
3 commentaires:
Mouais mouais… Drôle d'histoire tout de même alors que les madones à l'enfant sont légions dans notre iconographie…
Mais en ce qui concerne le corps des femmes il est clair qu'il a toujours été trop powerful ! un corps de super héros ou plus précisément de super héroïne, pour ne pas terrifier et déranger.
Une mère allaitante ;)
Ah, mais j'ai décidément manqué des choses intéressantes, sur ton blog ! Comme je suis d'accord avec toi, comme je regrette, moi aussi, que l'allaitement soit devenu in-montrable, par un renversement des valeurs qui fait d'une fonction nourricière un symbole sexuel.
Ce que je te dis ne t'étonnera pas, tu te souviens sûrement de la censure, sur MySpace, de la couverture de (Pro)Créations !
Oh que oui, Lucie, je m'en souviens, j'ai d'ailleurs failli en parler dans l'article. J'aurais dû. :)
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