8. FRAIL
C’est drôle, après tout ce qu’on a lu, tout ce qu’on nous a
dit.
J’ai fait ma thèse sur les vanités, alors vous pensez si je
connais le sujet à fond. La minceur éphémère des ailes de papillon, des pages
des livres ; le verre friable des boussoles et des pichets de vin ; les
mites qui rongent le velours et les vers qui grignotent les corps ; tout
passe, et nous fanons, comme la rose mignonne.
C’est aussi ce que nous leur répétions, toutes ces années :
ce n’est pas la planète qui va mourir, c’est nous. La planète est vieille et
solide, de roc et de magma, elle s’adaptera, à cela comme à tout, jusqu’à la
fin du Soleil. Non, c’est nous qui périrons, déshydratés, brûlés, empoisonnés ;
c’est nous qui sommes des coques frêles, des roses de chair, et notre peau
tombera comme un pétale.
C’est drôle.
Je suis assise là, au dernier jour de l’humanité, et je
regarde pousser une rose. Prends ça, Ronsard.
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