2. MINDLESS
Autrefois, on appelait ça des bullshit jobs. On a bien fait de changer. C’était vraiment trop
grossier. Et puis les excréments n’ont rien à voir là-dedans. Les mots sont
importants, vous savez. On leur a dit qu’ils occupaient des bullshit jobs et les gens se sont sentis
insultés, souillés, même. Ils ont commencé à protester, à invoquer leur
conscience. Certains sont entrés en dépression, d’autres ont démissionné. Vous
vous souvenez du mouvement NTM, que je préfère ne pas traduire, où les gens
refusaient d’assister à plus de quatre meetings par jour ? Et je ne parle
pas de ceux qui refusaient les déplacements si le temps de transport excédait
le temps de réunion, ni du nombre de GIF qui ont fleuri pour ridiculiser le
langage corporate. Il y a même eu des
articles universitaires sur le sujet !
Il suffisait de changer de mot : mindless jobs. C’est moi qui ai déposé l’expression, vous
savez ? Plus de grossièreté, plus d’excrément, plus de révolte. Mindless : on le fait sans y
penser, on le fait puis on n’y pense plus, il ne faut pas trop réfléchir à ces
choses-là, sinon c’est le burn-out assuré
et c’est vous qui en payez le prix.
Et vous voyez, c’est le mot qui a créé la réalité. Puisque
ce sont des mindless jobs, autant les
donner à des mindless people,
right ? D’une certaine façon, c’est grâce à moi qu’a été inventée la
MRT™[1].
C’est extraordinaire, personne n’aurait imaginé une telle avancée il y a dix
ans ! … Qu’est-ce que vous dites ? On appelle ça des Z jobs maintenant ? Je ne comprends
pas. Z comme quoi ?
Breaking news: MRT™ a remporté son procès. Les
employés ayant subi la technologie mind-relieving conserveront tous leurs
droits civiques, même si les réseaux sociaux continuent de les surnommer corporate zombies.
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